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Estelle Sauvage

Entretien avec Delphine Barré, co-fondatrice de la cave de spiritueux Français "Emile et Marguerite"

En tant que caviste et spécialiste des spiritueux "Made in France", Delphine nous livre son ressenti sur le second confinement, le Made in France, sa vision des fêtes de fin d'année et... d'Archibald Tonic ?

Emile et Marguerite - 13 rue du Parlement Saint Pierre à Bordeaux

La Cave Émile & Marguerite, comment définis-tu le concept en quelques mots ?

Représenter et mettre en avant le savoir-faire français dans sa globalité en matière de spiritueux.... en sélectionnant les meilleurs spiritueux sans passer par les grandes entreprises ou industries du secteur, mais en allant directement à la rencontre des producteurs. On couvre ainsi un spectre très large allant des alcools historiques comme le Calvados, l'Armagnac, le Cognac, mais aussi des gins, des whiskies, des rhums, des anisés, des liqueurs. Tout un tas de propositions... mais Françaises.


Pourquoi ce projet ? comment en es-tu arrivée là ?

J’avais un restaurant à Cognac, l’ArtiShow, dont la démarche était de mettre en avant le savoir-français, et de s'inscrire dans le locavore. J’avais déjà ces convictions...

Quand j'ai mis un terme à l’Artishow, au même moment Thomas, mon associé aujourd'hui, a fait le constat qu’il n’y avait pas une seule cave en France qui répertoriait une quantité importante de spiritueux français. Thomas connaissait très bien ma façon de travailler, et m’a toujours suivi dans tout ce que j’ai monté, que ce soit farfelu ou non. Il m’a dit : "Delphine, j’ai ça en tête, est-ce que ça t’intéresse de le monter avec moi ?" Donc il a eu les prémices de l’idée et moi j’ai brodé tout autour : j’ai ajouté les bières et on a vraiment élargi le spectre de sélection des produits. On a aussi privilégié la dégustation dans la boutique, ajouté plein de choses au fur et à mesure qu’on apprenait.

Donc pour résumer, l’idée de départ, c’est qu’il n’existait pas de cave à spiritueux français en France.


Et une cave de spiritueux français, ça marche ?

En ayant essuyé la première année de 2018 marquée par les gilets jaunes, la 2ième année les manifestations, les grèves, et cette année le Covid… au bout de 3 ans, on est toujours là !

En juillet, notre activité enregistrait une hausse de 70% par rapport à l’année dernière, en août +20%, sachant qu’août est le meilleur mois de l’année pour nous, juste après Noël. Tous nos records ont donc explosé cet été ce qui nous permet de voir un peu venir l’après confinement.

Le bilan de cette année est bon, comme celui de l'année dernière.

En revanche, la première année a été très délicate car on a exploré un secteur d’activité qui n’existait pas. On est assimilé comme des cavistes qui vendent du vin. Or le taux de marge n’est pas du tout le même en réalité car 90% de mes ventes sont des spiritueux.

Selon notre comptable, les marges étaient insuffisantes : il a donc fallu revoir toutes les négociations avec nos producteurs, de manière à se passer des agents. Soit nous adaptions notre modèle, soit nous mettions la clé sous la porte.

Désormais, on a de nouvelles directives : travailler en direct ou avec un distributeur mais sans agent. Pour nous l’agent n’a aucune plus-value puisqu’on a un budget alloué à la visite de nos producteurs. 2 jours dans la semaine où je ne travaille pas, hors saison, sont dédiés à la rencontre de tous mes producteurs pour découvrir leurs nouveaux produits, leurs actualités,…


Au sein de ta cave de spiritueux Made In France, quelles sont les tendances que tu constates ?

Quand on a ouvert la boutique en 2018, on ne savait pas du tout ce qui allait se passer : on a rectifié le tir sur plein de choses au fur et à mesure. Surtout sur le gin ! On est passé en 2 ans de 5 gins à près de 50. Donc la grosse tendance, c’est le gin. Je suis d'ailleurs sollicitée quasi tous les jours pour en rentrer de nouveaux : tout le monde se met à en faire. Car le champ de création est infini : tu peux intégrer tout type de distillats botaniques, faire vieillir,... Alors que pour les autres spiritueux comme le calvados, le cognac, l’armagnac, le rhum, le whisky, le cahier des charges plus strict restreint les possibilités.

Quelles sont les marques de gin demandées par tes clients ?

Je réponds à un besoin : "Voulez vous un gin floral ? poivré ? citronné ?" Et j'oriente ainsi sur le ou les gins de mon choix, ceux qui me semblent correspondre à cette envie. J'ai cette démarche car j'ai une sélection large de 50 gins qui me permet de le faire. Si quelqu'un veut un gin poivré par exemple, j'en ai 3.


Est-ce que pour tes clients viennent dans ta cave pour le Made in France ou tout simplement pour ta sélection de produit ?

Bonne question ! Je pense que c’est pour un ensemble de choses : avant tout, oui, acheter français est une satisfaction, mais ensuite tu as tout ce qui suit derrière : tu as l’expérience client . On leur parle des producteurs, que ce soit Thomas ou moi, on fait beaucoup de blagues tout en aidant les gens, on s’amuse beaucoup tout en étant professionnel. On adore ce qu’on fait, on est passionné et je pense que ça rayonne. Au final, les gens (re)viennent un peu pour tout ça. Pour les produits, pour l’ambiance, pour la boutique – le lieu est très joli, pour les dégustations...


Et ce 2ième confinement ?

Concrètement pendant ce deuxième confinement, ça ne se bouscule pas... contrairement au premier.

Le Covid propulse le Made In France sur le devant de la scène. Mais pour être honnête, il y a encore beaucoup de paroles pour peu d’actes, même si tout le monde parle de recentrer la production en France, de promouvoir tout ce que l’on sait faire ici chez nous.


Les fêtes de fin d'année...

Dans ta boule de cristal, t’y vois quoi ?

Je vis au jour le jour ! J’ai Clément qui est en stage en ce moment avec moi, et c’est chouette parce que comme ça je ne suis pas toute seule dans ma cave à me demander ce qui va se passer ;)

Bref, on reste très actif sur plein de choses. On vit au jour le jour. Moi, je me lève le matin, j’ai la patate, je suis contente d’aller bosser. Je suis contente d’avoir des projets au jour le jour aussi.

Et aussi globalement, si j’ai un avis à donner… je pense que le gouvernement ne peut pas laisser les commerces fermés pour les fêtes de Noël. Il va tuer tout le monde.


Qu’est-ce que tu comptes mettre en place ? Mettre en avant ?

Je ne mets rien de particulier en avant. Actuellement, on a une offre avec le gin Balbine de Julien Maingraud pour lequel on offre 2 tonics bio, Artonic et Archibald.

Mais je ne fais jamais de réduction sur les prix. Je ne dévalorise jamais les producteurs et leurs travail. Non, pas de promo de ce type chez moi.


Et Archibald dans tout ça...

Quel est son rôle dans ta gamme de tonic ?

Archibald est affiché dans la boutique comme « tonic haut de couture local ». C’est comme ça que je le perçois, mais c'est aussi ce qui est perçu par les clients. Hormis les gins London Dry très botaniques, très portés sur la baie de genièvre pour lesquels, je ne conseille pas Archibald... pour tout le reste, le reflexe client c’est Archibald.


Avec quels gins le recommandes-tu ?

L’Édition Limitée D'Archibald aux distillats de bergamote et de gentiane vieillis en fût fonctionne très bien avec tous les gins floraux (à la rose, à la violette...) Archibald Original va bien avec tous les autres : avec les citronnés, tout ce qui est un peu relevé "piment" comme le Pink Pepper. Moi, je préconise Archibald avec tout sauf pour les London Dry.


Et toi, Delphine, qu'est-ce que tu penses personnellement d'Archibald ?

On a ouvert, tout à l’heure avec Maxime du Bar Simone, une bouteille d’Archibald pour faire une vidéo avec le gin Nouaison. On en a pris qu'une petite quantité... et bien : j’ai fini la bouteille ! C’est peu sucré, et moi ça me va très bien. J’ai horreur de tout ce qui est limonade trop sucrée. Donc pour se désaltérer c’est parfait. Et d'ailleurs, pourquoi pas (parce que je l'ai déjà fait aussi) de le proposer avec une infusion de thé pour aromatiser un peu. Comme c’est un tonic avec un distillat de gin, c’est un peu un gin sans alcool.C’’est une façon très sympa de se faire plaisir à l’apéro sans que ce soit alcoolisé... et sans se ruiner en comparaison avec un spiritueux sans alcool à 40€ qui ressemble à de l’eau aromatisée...




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